Titina Silá, l’indépendantiste!
Le 30 Janvier 1973 prend fin le combat pour la liberté de la guerrière indépendantiste « Titina » comme on l’appelle affectueusement.
Ernestina Silá se bat pour sa vie et celle de ses compagnons mais l’embuscade de l’armée coloniale portugaise ne leur laisse aucune chance.
La combattante du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert mène un cortège de combattants aux obsèques de celui qu’elle considère comme son mentor et son frère. Elle n’a finalement pas l’occasion de lui faire ses adieux comme si le sort s’acharnait à jumeler leurs fins tragiques.
En effet, dix jours plus tôt, le 20 janvier 1973, dans des circonstances similaires, Amílcar Cabral meurt à Conakry sous les balles de la police politique portugaise.
Aujourd’hui, c’est le tour de Titina.
Alors qu’elle amorce la traversée de la rivière Farim, dans le nord de la Guinée, dirigeant un canot de combattants, elle se retrouve piégée sous les tirs nourris des soldats portugais.
Sans aucune possibilité de replis, c’est de cette façon que Titina et ses hommes périssent noyés.
Leur trajectoire rejoint celle de leur camarade sous les balles portugaises.
Titina n’a que 30 ans
Une jeunesse interrompue qu’elle a offerte à la cause dès son adolescence.
Depuis le massacre des dockers du Port de Pidjiguiti qui demandaient de meilleures conditions de travail.
Elle est là ce 3 août 1959, lorsque l’armée coloniale répond par les armes.
S’en suit le massacre d’une cinquantaine de marins et de dockers.
On dénombre plus de cent blessés.
Une scène d’horreur qui sème les graines de sa révolte.
Elle ne veut plus être témoin, elle veut agir, commence alors sa quête idéologique.
La Titina politique est en marche !
Dans un premier temps, elle tâte le terrain en assistant à une réunion politique du MLG (Movimento para Liberataçao da Guiné), le Mouvement de libération de Guinée. Mais elle ne s’y retrouve pas.
En revanche, sa rencontre avec le PAIGC (Parti Africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert) la transcende. Surtout le discours d’Amilcar Cabral. Le message résonne en elle. Unité et lutte contre le colonialisme.
Cependant, elle doit s’armer de patience car elle est trop jeune pour intégrer la résistance.
Titina Silá contourne la difficulté et obtient le droit d’assister à certaines réunions.
En 1961, la jeune infirmière diplômée de 18 ans, rejoint officiellement les rangs du PAIGC.
Elle est vive d’esprit et motive la jeunesse.
Elle attire l’attention du parti qui l’envoie suivre des formations politiques en Union Soviétique.
Des acquis qu’elle transmet aux femmes de retour au pays.
Puis en 1963, le Portugal ferme le dialogue et la lutte armée s’impose.
Le maquis
Titina Silá rejoint les combattants et gravit rapidement les échelons grâce à son son intelligence et son courage.
Elle gagne le respect de ses compagnons de lutte à la tête desquels se trouve Amilcar Cabral.
Celui qui se fait appeler Abel Djassi, la prend sous son aile. Il devient son mentor et son ami.
C’est ainsi qu’il lui confie la direction du Comité de la milice populaire dans le nord du pays, dont la mission est d’organiser le passage des personnes et des biens sur la rivière Cacheu.
Une mission vitale pour l’approvisionnement de la résistance.
Elle est à la tête d’une unité de plus de 200 hommes qui ne tarissent pas d’éloges sur sa vaillance au combat.
La réputation de la vaillante guerrière gagne tout le pays car on la considère comme une protectrice et un guide.Pendant plus de 10 ans, Titina et ses hommes sécurisent le front Nord et gagnent de nombreuses batailles.
Le 30 janvier, tout s’arrête pour Titina Silá.
En son honneur et celui des autres combattants de la liberté qui ont donné leur vie pour la cause, une statue est érigée dans la ville proche de la rivière où elle a été assassinée.
Le 30 janvier a été créé la fête de la femme guinéenne en hommage à Titina qui faisait aussi partie de l’Union démocratique des femmes de Guinée et du Cap-Vert fondée en 1961.
Le 24 septembre 1973, la Guinée-Bissau obtient son indépendance. Plus de 80% du territoire avait été libéré par les combattants du PAIGC.
Comme Titina Silà et Amilcar Cabral, beaucoup de combattants auront donné leur vie pour l’indépendance sans la vivre.
« Guerra cata cumé pom,pecadur ki ta cumé »
( la guerre ne mange pas du pain mais des Hommes)
João Bernardo Vieira, dit « Nino Vieira » ( 1939-2009 )
2 Comments
Ndombong Hervé Bertrand
Excellent article. Chapeau pour la thématique et les textes. Je n’ai lu que quelques uns.
Histoire du Monde Noir
Merci Hervé pour l’intérêt